LE RÔLE DES YEUX DANS L’ÉQUILIBRE POSTURAL

Le capteur oculaire est un des 6 capteurs sensoriels du système postural d’aplomb. Si bien que les yeux ont un rôle central dans le contrôle de la posture.

En posturologie, l’équilibre et la bonne posture d’un individu se traduit par l’alignement des pieds sur le sol et des yeux sur l’horizon. Si ces deux conditions ne sont pas réunies, le corps est toujours en mesure de se mouvoir puisque les autres capteurs compensent. Néanmoins, des déséquilibres posturaux apparaissent et causent des douleurs et d’autres symptômes contraignants dans la vie quotidienne.

D’où la nécessité de surveiller le bon fonctionnement et la bonne santé des yeux et particulièrement des muscles oculomoteurs.

L’importance des yeux dans le maintien postural

La double fonction des yeux

Organe de la vue, l’oeil détient un double rôle au sein du système postural : c’est à la fois un exocapteur et un endocapteur.

D’une part, la rétine (exocapteur) reçoit les informations extérieures au corps pour que l’homme observe son environnement et s’oriente dans l’espace.

D’autre part, les muscles oculomoteurs (endocapteur) permettent aux yeux de se mouvoir. Ils transmettent également au cerveau les informations concernant le corps par rapport à son environnement, et plus particulièrement la position adoptée par les yeux par rapport à l’espace. Toutefois, pour voir correctement, il faut que la tête puisse suivre le mouvement des yeux. Ainsi, les muscles oculomoteurs sont associés aux muscles de la nuque : c’est le réflexe oculo-céphalogyre. Ces deux groupes musculaires fonctionnent de manière coordonnée. Ensemble, ils fournissent au cerveau les informations concernant le comportement des yeux par rapport à son environnement et la cible : Est-ce que les yeux et la tête bougent pour suivre la cible ? La cible est-elle fixe ou en mouvement ?

Grâce à cette double fonction, les yeux ont une place importante dans le maintien postural.

Les déséquilibres oculomoteurs et leur impact sur la posture

Comme pour tout autre capteur du système, si les yeux, et plus particulièrement les muscles oculomoteurs, souffrent d’une déficience ou d’un déséquilibre, le système compense le manque. C’est ainsi que l’homme peut toujours se maintenir debout et se mouvoir.

Le fonctionnement est simple : si les muscles oculomoteurs ne fonctionne pas correctement, les yeux ne peuvent pas bouger comme ils le devraient. Dans ce cas, les informations que les muscles transmettent au cerveau sont faussées. Pour éviter cela, le cerveau rectifie le problème en adaptant la posture de l’individu au besoin. Au lieu que les yeux bougent, ce sont d’autres zones du corps qui le font pour compenser. Bien évidemment, dans ce cas, la zone cervicale est la première à être touchée. En effet, la tête va devoir faire le mouvement ou se positionner de façon à compenser les mouvements que les muscles oculomoteurs ne peuvent pas faire. Cependant, à terme, des troubles posturaux apparaissent car la position de la tête, et donc du reste du corps, n’est plus naturelle. Et même si le corps ne ressent pas directement la faiblesse des muscles oculomoteurs, la mauvaise posture prise entraîne des douleurs qui peuvent rapidement handicaper la vie quotidienne.

Il existe différents types de déséquilibres oculomoteurs et chacun entraîne diverses modifications de la posture et troubles :

  • – Une hétérophorie : c’est une déviation des globes oculaires. Causée par une faiblesse des muscles oculomoteurs, le mouvement des yeux n’est plus symétrique et l’axe visuel n’est plus aligné. Contrairement à un strabisme, cette déviation n’est pas permanente et ne touche pas l’oeil au repos.

Il existe plusieurs hétérophories selon la déviation :

  • – l’exophorie (lien article « L’impact postural d’une insuffisance de convergence oculaire ») lorsque la déviation est divergente
  • – l’ésophorie lorsqu’elle est convergente
  • – l’hyperphorie quand la personne regarde vers le haut
  • – l’hypophorie quand elle regarde vers le bas.

Selon l’hétérophorie, certaines situations vont contraindre la personne à maintenir une posture qui n’est pas naturelle et qui causera des douleurs. C’est ainsi qu’une personne qui souffre d’une insuffisance de convergence se penche et rapproche sa tête dès qu’elle doit voir de près (lecture, utilisation des écrans, …). On comprend donc qu’à moyen voir long terme, cela lui provoquera des douleurs au dos et aux cervicales.

  • – Des lunettes de vue dont la correction n’est plus adaptée : les verres de lunette sont fait pour que la correction nécessaire se trouve face aux pupilles. Si ce n’est plus le cas, l’individu oriente naturellement sa tête afin de retrouver une vue confortable.
  • Un trouble postural touchant un autre capteur sensoriel : lorsque les yeux ne sont plus alignés sur l’horizon, encore une fois, la tête et les muscles oculomoteurs compensent. Par exemple, un individu qui ne se tient pas droit car il a une jambe plus courte que l’autre (même si ce n’est pas visible à l’oeil nu ou contraignant pour la personne), penche la tête pour que les yeux restent alignés. Même le plus petit écart peut provoquer un déséquilibre dans la posture.

Ces dysfonctionnements au niveau des yeux font donc apparaître des déséquilibres posturaux qui provoquent des douleurs et à termes divers symptômes :

  • – Rotation de la tête
  • – Douleurs au dos et aux cervicales : cervicalgie, sciatique, lumbago, …
  • – Céphalées
  • – Dyspraxie visuo-spatiale, trouble de la concentration
  • – Vertige, nausée
  • – Fatigue visuelle
  • – Fatigue générale
  • – …

Ainsi, il est important de détecter la possible déficience du capteur oculaire, non seulement pour soulager certaines douleurs mais surtout pour éviter des troubles posturaux qui auront des conséquences plus graves.

La détection de l’asynchronisme du capteur oculaire

Plusieurs tests existent pour détecter un trouble oculomoteur tels que le test de la motricité oculaire ou encore le test de la convergence. Généralement, après détection, le trouble est traité grâce à des séances d’orthoptie (rééducation des muscles de l’oeil). Néanmoins, ces tests ne permettent pas de comprendre l’origine du problème. Or, si l’origine du trouble provient d’un déséquilibre postural et donc d’un autre capteur, cette solution ne sera pas durable.

Si un professionnel de santé vous diagnostique un déséquilibre des muscles oculomoteurs, nous vous conseillons de faire un bilan postural auprès d’un médecin spécialiste en posturologie. Un orthoptiste peut être spécialisé en posturologie, comme c’est le cas de nombreux autres médecins (podologue, ostéopathe, dentiste, ORL, ophtalmologiste, médecin généraliste, kinésithérapeute, …). Le bilan postural est un examen qui permet d’analyser l’ensemble de la posture et chaque capteur sensoriel à l’aide de plusieurs tests et dispositifs médicaux afin de détecter d’où provient le trouble postural.

La méthode de Maddox

Parmi les tests effectués durant le bilan, le test de Maddox est celui qui permet de vérifier le capteur oculaire. Cette méthode consiste à regarder un point lumineux placé à 2 mètres de distance. Devant un oeil ouvert est placée la baguette de Maddox (composée d’une lentille rouge avec des lignes parallèles), l’autre oeil reste ouvert et à découvert. Ainsi, l’oeil découvert voit le point lumineux tandis que l’autre voit une ligne lumineuse horizontale ou verticale en fonction de la position de la baguette. Cet examen est fait sur les deux yeux. Si la ligne passe sur le point lumineux, les yeux ne présentent pas d’asynchronisme, on dit qu’il y a une orthophorie (horizontale ou verticale). Néanmoins, si la ligne est en décalage par rapport au point, il y a une hétérophorie. Et le médecin est en mesure de déterminer laquelle selon ce que voit le patient.

Ainsi, la méthode de Maddox permet de diagnostiquer les différents types d’hétérophories comme présenté sur l’image.

Toutefois, si le trouble est causé par un autre capteur, les autres tests du bilan postural permettront de déterminer lequel est en cause.

Les solutions

Après avoir diagnostiqué le trouble et son origine, le praticien est en mesure de proposer à son patient le traitement adapté. Généralement, une hétérophorie est traitée grâce à des séances d’orthoptie. En plus de la rééducation des muscles oculomoteurs, certains individus se voient prescrire des séances d’ostéopathie. C’est généralement pour soulager voir traiter les déséquilibres posturaux engendrés par le trouble oculomoteur.

Dans le cas où un autre capteur est dysfonctionnel, le médecin redirigera le patient vers le professionnel de santé adapté.

De même si la mauvaise posture vient de lunettes de vue. Dans cette situation, cela est facilement détectable par le posturologue, notamment avec le test à la verticale de Barré.